Lost Coast

Publié le 5 Août 2014

On a ben trippé moi & toi. Sans joke. Un deux mois de complicité pas pire je dirais. On a même vécu des affaires de Redwood et de côte californienne. Le genre d'affaire que tu revivras jamais dans ta vie, c'est trixte, mais c'est de même. Tu te rappelles la beach perdue? Celle qui donnait sur le pacifique. L'eau état ben trop froide, mais j'avais quand même le goût de me baigner toute nue. Juste parce que c'était la vibe du moment. Se lever le matin, un peu trop dans la colle de la veille, pas trop savoir yé quelle heure et aller ramasser nos moules avant que la marée monte. Fallait ben souper. Un genre de mode de vie à la hippie, même si t'aimais pas ben ben ça que je dise ça. Beaucoup trop responsable le gars. Le gars y'a une autre vie beaucoup plus sérieuse qui l'attend éventuellement. Mais à ce moment là, tu vivais pas pire dans le présent. T'aimais tellement pêcher dans la mer, ça me rendait amer comme un thé vert sencha qui a infusé ben trop longtemps. Tu me demandais souvent, pas rapport, d'arrêter pour pêcher, t'attrapais jamais rien, mais au moins je pouvais me baigner toute nue. Des fois, je ramassais des framboises pour passer le temps, on en faisait des confitures pas trop jam, un peu plus genre sirop de fruits, c'était bon quand même. Faisait frette sur la beach, j'aurais ben voulu me trimbaler en bikini pour attirer un peu plus ton attention, mais j'en avais pas le courage. J'mettais mon gros manteau qui me faisait pas trop bien pi j'allais marcher plus loin. Tu te rappelles, un moment donné, y'avait un cerf sur la beach. Je capotais. Tu comprenais pas trop. Chez-toi ça semblait pas tant exceptionnel. Pour moi, l'eau salé et les chevreuils vont pas trop trop ensemble. Mais c'est vrai que là y'avait une forêt juste à côté de la beach, on y avait caché notre tente dans un petit coin. Tu m'avais patenté une douche avec un vieux bidon parce que je chialais un peu trop, tu faisais même bouillir l'eau pour que ça soit pas pire chaud avant que j'y aille, pi je le sais que tu me regardais. C'était beau une femme qui se lavait sous un bidon dans une forêt, j'suis certaine. Y'avait même des lièvres, on aurait pu survivre pas pire longtemps je pense. Il ventait beaucoup, mes cheveux comprenaient pas trop & ma peau goûtait salée. C'était l'fun. Mon moment préféré c'est quand on se retrouvait le soir, le soleil se couchait lentement, on se collait sur le bord du feu et tu m'embrassais souvent. Je trouvais ça patétiquo-romantique, mais j'aimais quand même ça au fond. On dormait bien, pas longtemps, pas souvent, mais bien. J'avais jamais froid à ce moment là. J'ai découvert aussi une source d'eau douce qui venait de la forêt et qui rencontrait l'océan, ça faisait du bruit, ça se fracassait fort les courants contraires. J'aimais ça regardé ça, j'avais l'impression que c'était ce qui se passait dans ma tête un peu. Du salé pi du pas-salé qui se rencontrent, c'est passionnel, mais c'est violent. C'est un peu rare aussi. Y'avait des otaries des fois et des grosses carcasses de poissons bizarres. C'était mythique, j'aimais ça. C'était un autre monde parce qu'on avait roulé dans des routes pas rapport avant d'y arriver, c'était ça le plus beau on était nulle part, et j'pense pas qu'on serait capable d'y retourner honnêtement. Peut-être que ça existe même pu. Pour nous c'était la Lost Coast. Je l'oublierai jamais. Sauf qu'à un moment donné, y'a fallu se placer, il parait qu'on peut pas s'évader trop trop longtemps. Je sais pas combien de temps on est resté là, deux jours, trois mois ou quatre ans, mais en pliant notre tente pour de bon, j'ai quand même essayé; je t'ai demandé d'aller au Mexique, tu m'as dit «non», parce que t'étais tombé amoureux, je le sais, moi aussi un peu, mais moins que toi. Toi tu disais pas «tomber amoureux», tu disais «perdre pied», c'était quand même cute. On serait jamais revenu du Mexique, tu le savais ben trop. Au retour, le silence pesait lourd dans l'auto, d'habitude je suis à l'aise avec les moments de silence awkward, mais là c'était plus des moments de silence du genre «si je parle je pleurs, je crie, pi je te demande à genoux de m'amener avec toi». J'ai l'air folle dans ces moments là, donc j'aime mieux me taire. Toi aussi on dirait ben. La route a fini par finir et ça fait qu'on a du se dire «bye» finalement pi c'était trixte. Du genre comme un film. Moi sur un balcon à t'envoyer la main, toi qui embarque dans le taxi, un peu perdu de retrouver la ville, et je l'ai vu dans tes yeux que ça te faisait mal. Un peu plus que je pensais, un peu moins que moi. On savait pas si on allait se revoir, on avait juré de pas s'écrire, t'avais quand même ta famille.

Lost CoastLost Coast

«Des fois je rêve que je marche encore sur cette beach là, mais je suis toute seule, comme si t'étais pas venu me rejoindre. C'est comprenable, je t'avais pas trop averti d'avance que j'y retournais.»

Rédigé par CY - « See Why»

Publié dans #Raw

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